Garage à bateau, Raiatea, vue sur Bora-Bora au fond

Protocole n°2

Le cadrage

 Je souhaite capturer le bleu de la mer. Uniquement le bleu. le cadrage le plus naturel qui me vient à l’esprit est la capture frontale de ce bleu. Je le photographierai vu de dessus, je ne souhaite pas refaire ce qu’Hiroshi Sugimoto a déjà fait. Aucun élément ne doit perturber l’œil. Le sujet est le bleu. Le spectateur verra le bleu. Juste le bleu. Je ne veux pas d’animaux ou de plantes sous l’eau, rien qui ne flotte à la surface, pas de reflets distrayants. Le bleu brut, brutal, immense. Il nous renvoie directement à nos pensées, à nos forces, à nos craintes. Le bleu, couleur de l’immensité, de la réalité immatérielle, de la sensibilité immatérielle comme le disait Klein, le bleu pousse à l’introspection.

Comment procéder ? Le cadre sera entièrement rempli de bleu. Il me faut trouver une solution pour le capturer frontalement, c’est à dire vu du dessus, appareil parfaitement parallèle avec la surface de l’eau.

Il ne faut pas montrer le bord du bateau depuis lequel je photographierai. Je peux fixer l’appareil au bout d’un trépied tenu à bout de bras, mais comment procéder pour s’assurer qu’il est horizontal ? Je me renseigne auprès d’un ami beaucoup plus dégourdi que moi en bricolage. Il me propose la solution d’accrocher l’appareil à un ballon. L’idée semble séduisante, mais impossible car je ne peux pas contrôler le cadrage, ni les éléments pris dans le cadre (présence de coraux, poissons ou autres) avant le développement. Finalement, même au bout d’un trépied ou d’une perche, le problème sera le même. Et puis… Comment déclencher un appareil argentique suspendu à un ballon ? De plus, je viens d’apprendre que plus personne ne développe de film couleur sur Tahiti.

Tout ceci commence à être complexe.

Raphaël Mezzapesa

Raphaël Mezzapesa

Musicien à l'origine, je me suis également intéressé à la photographie depuis mon plus jeune âge. Les modes d'expression de ces deux arts diffèrent et se complètent. Là où la musique développe son expression à travers le temps, ce qui me fascine dans la photographie, c'est cette capacité à transmettre une émotion, un ressenti au regardeur en une fraction de seconde.